Jean Guidoni et Yves Navarre, deux « cas particuliers »
- Karine
- Déc, 01, 2025
- Vie de l'auteur
- No Comments.
Jean Guidoni, décédé le 21 novembre dernier, peut être qualifié de « cas particulier », en référence à l’un de ses albums. Ses cinquante années de carrière, jalonnées d’une bonne vingtaine d’albums et de nombreux spectacles, souvent inclassables, resteront, dans le monde parfois étrange de la chanson française, comme un exemple surprenant de créations, de remises en question, de ruptures et de renaissances dignes d’un véritable phénix. Yves Navarre, autre « cas particulier », avait croisé sa route…
Alors qu’il est en pleine rédaction de Premières Pages à Lioux, Yves Navarre fait un bref séjour à Paris, mi-septembre 1982, pour assister à l’une des réunions de la commission d’avances sur recettes dont il est membre. Il en profite pour se rendre au Théâtre des Bouffes du Nord à l’occasion de la création du spectacle Crime passionnel, « opéra pour un homme seul » écrit et composé par Pierre Philippe et Astor Piazzola pour Jean Guidoni.
Une carte, un décor, une rencontre
Quelques années plus tard, en 1986, lors de l’émission Effraction consacrée à Jean Guidoni, Yves Navarre fera référence à ce spectacle avec une anecdote troublante : « Je vais raconter ma rencontre avec Jean Guidoni. J’étais au paradis, c’est-à dire au dernier étage des Bouffes du Nord. J’étais très heureux d’y être. J’avais un petit peu le vertige […] J’étais au premier rang du paradis et j’ai eu une vue plongeante sur un décor qui m’a évoqué une carte postale que j’avais achetée il y a dix ans, de passage à New York, qui représentait un lit défait avec une flaque de sang et j’avais été fasciné – il y avait eu comme une répulsion et une fascination. […] Et cette carte, je l’ai gardée pendant dix ans dans mon tiroir […] et je ne trouvais jamais l’occasion d’envoyer cette carte qui était d’une cruauté, d’une passion terrible. Et puis je suis allé voir le spectacle de Jean aux Bouffes du Nord […] et j’ai vu quoi ? La carte. Je me suis dit : je ne connais pas Jean Guidoni mais voilà, cette carte a une signification, je l’ai achetée il y a dix ans, je vais la lui envoyer. Je lui envoie, je le rencontre, il me dit : c’est à partir de cette carte que nous avons fait le décor. »

« Ce que j’aime chez Jean, c’est qu’il chante avec son ventre »
Lors de cette émission, Effraction, qui lui est consacrée sur France 3 Paris, Jean Guidoni a convié plusieurs personnalités, parmi lesquelles William Sheller et Yves Navarre. C’est l’occasion pour l’écrivain de dire tout le bien qu’il pense de Guidoni : « Ce que j’aime chez Jean, c’est qu’il chante avec son ventre. C’est-à-dire, pour moi, il m’évoque ce que j’adore dans la chanson. J’aime Suzy Solidor, j’aime Marianne Oswald, j’aime Piaf. Pour moi, Jean, c’est le Suzy Solidor, c’est le Marianne Oswald et c’est le Edith Piaf qui chante avec son ventre ; ça me parle. Et puis, il est culotté. Il chante des chansons qui sont déculottées. Il n’ose pas avoir peur. Je veux dire par là qu’il va jusqu’au bout de ses chansons. Et alors, ça me touche. Ça m’embarque. »

« Le regard de Jean pour lequel j’ai écrit des chansons. Les chantera-t-il ? »
Le 20 mars 1987, Yves Navarre assiste à un récital de Jean Guidoni à l’Élysée-Montmartre. Le lendemain, il note dans son Journal* : « J’ai erré la nuit dernière après le spectacle de Jean Guidoni. C’est vraiment le grand chanteur de notre temps. Je lui ai, en coulisses, promis une chanson qui s’intitulera Baisers interdits. On verra. »
Le 1er mai 1987, Yves Navarre assiste à un gala pour Radio Libertaire auquel Jean Guidoni apporte son soutien. Le 2 mai, il note dans son Journal : « Jean Guidoni toujours aussi franc, percutant, poignant au Dejazet. Les chansons que j’ai écrites pour lui sont un peu tombées dans l’oubli. » Et le 3 mai : « J’ai dit à l’agent de Jean Guidoni que je n’irai plus écouter Jean que lorsqu’il chantera les chansons écrites pour lui. » Ces chansons, Guidoni, hélas, ne les chantera pas.
* Journal, BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
Articles récents
Archives
- décembre 2025
- octobre 2025
- août 2025
- juin 2025
- mai 2025
- avril 2025
- février 2025
- janvier 2025
- décembre 2024
- octobre 2024
- septembre 2024
- juin 2024
- mai 2024
- avril 2024
- mars 2024
- février 2024
- janvier 2024
- octobre 2023
- septembre 2023
- juillet 2023
- juin 2023
- mai 2023
- mars 2023
- février 2023
- janvier 2023
- novembre 2022
- octobre 2022
- juillet 2022
- juin 2022
- mai 2022
- avril 2022
- mars 2022
- février 2022
- janvier 2022
- novembre 2021
- septembre 2021
- juillet 2021
- juin 2021
- mai 2021
- avril 2021
- mars 2021
- février 2021
- janvier 2021
- décembre 2020
- novembre 2020
- octobre 2020
- septembre 2020
- juin 2020
- mai 2020
- avril 2020
- mars 2020
- février 2020
- janvier 2020
- novembre 2019
- octobre 2019
- septembre 2019
- août 2019
- juillet 2019
- juin 2019
- mai 2019
- avril 2019
- mars 2019
- février 2019
- décembre 2018
- novembre 2018
- octobre 2018
- juillet 2018
- juin 2018
- mai 2018
- avril 2018
- mars 2018
- janvier 2018
- novembre 2017
- octobre 2017
- septembre 2017
- juin 2017
- mai 2017
- avril 2017
- mars 2017
- février 2017
- janvier 2017
- décembre 2016
- novembre 2016
- octobre 2016
- septembre 2016
- juillet 2016
- juin 2016
