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Quand Normand Moffat sculptait les pieds et les mots d’Yves Navarre

Yves Navarre a inspiré de nombreux artistes en France et à l’étranger. Le sculpteur québécois Normand Moffat a réalisé en 1991 un moulage des pieds de l’écrivain pour une œuvre monumentale en hommage aux auteurs et à leurs textes.

Exposée pour la première fois au musée de Lachine, ville natale de Normand Moffat, du 2 novembre au 29 décembre 1991, la sculpture inspirée par Yves Navarre est intitulée : Il avait toujours un texte à écrire, encore un texte, le fil des mots le rattachait à la vie. « Ce Monument pour les vivants, selon le sculpteur, est en cours de réalisation quand Moffat, lisant La Terrasse des audiences au moment de l’adieu d’Yves Navarre*, découvre une phrase qui devient le titre de la sculpture » précise d’Hedwige Asselin dans sa chronique Normand Moffat au Vieux-Port, à l’occasion d’une nouvelle exposition de l’œuvre au Salon international de la sculpture de Montréal (21 juin – 7 septembre 1992).

Une œuvre vibrante d’émotion qui désigne le sensible et l’éphémère

Composée de bois, d’acrylique et de plâtre, la sculpture de Normand Moffat représente une roue de deux mètres de haut (1,8 m de diamètre) et 45 cm d’épaisseur. Posés à l’intérieur de la roue en position d’actionnement, les pieds d’Yves Navarre semblent de bronze, plâtre subtilement patiné de vert-de-gris. Selon Hedwige Asselin, ils symbolisent « l’auteur qui déroule ses textes de l’intérieur de lui-même. La roue, forme dynamique par excellence, est à la fois l’image de la perpétuelle écriture et de la presse à imprimerie. Des lettres se détachent de la roue, dans son sillage sur le sol, comme le texte de l’auteur, puis se distancent à la manière des choses qui tombent dans la mémoire. La démarche de Moffat convient bien au sens de l’œuvre puisqu’il considère le bois comme le corps de la sculpture, à l’instar des lettres, et la couleur lui donne sa peau, son âme. Le sujet et la réalisation aussi intimement liés donnent une œuvre vibrante d’émotions. C’est ce qu’a reconnu Télé-Direct en lui décernant le premier prix de la sculpture intérieure. »

Pour Alain Gignac, auteur de Normand Moffat, l’apprentissage de la sérénité : « … le jaillissement désordonné d’une profusion de caractères d’imprimerie, les ’lambeaux’ de sens, tous les éléments de ces ‘monuments’ sont destinés à mettre en lumière la fragilité de l’homme (ou son inaptitude à communiquer avec ses semblables). C’est en désignant le friable, le sensible, l’éphémère, le transitoire, c’est en nous rappelant qu’une vie humaine, fut-elle celle d’un saint, d’un héros, d’un génie, toujours entravée de sa finitude, ne pourra jamais être une création absolue, que Moffat parvient le mieux à nous restituer quelque chose du caractère sublime de nos actes — au fond dérisoires — de création. »

 


À propos de Normand Moffat
Peintre et sculpteur né à Lachine en 1949, Normand Moffat étudie la peinture aux Beaux-Arts et obtient un Baccalauréat en arts plastiques de l’Université du Québec à Montréal en 1972. Dans ses œuvres, il utilise des matériaux très divers comme l’acrylique, le bois, le plâtre, le papier, la feuille d’or ou d’argent, sans compter la présence de lettres de l’alphabet référant à la connaissance. Il a notamment conçu la grande murale de briques de verre pour la station Saint-Michel du métro de Montréal.

* roman paru aux éditions Leméac en 1990.

Sources photos : © Michel Dubreuil (revue Espace Culture n°23, printemps 1993) ; détail de l’invitation à l’exposition de Lachine (via Mychel Robert).

 

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